LA MORT DE SAINT JOSEPH (G. Chrisment)
GABRIEL CHRISMENT (né en 1883)
Prêtre du diocèse de Saint-Dié, Gabriel Chrisment est un "prêtre-poète", comme le furent aussi Louis Le Cardonnel, Maxime Rousseau, Camille Melloy, ... Le poème qui suit est extrait du recueil intitulé En feuilletant le calendrier, à la date du 19 mars.
La mort de saint Joseph
Ce soir-là, Joseph a dû s'appuyer
Sur son établi, pour ne pas tomber.
Il est las, si las, depuis des semaines,
Un rien le fatigue, il marche à grand-peine.
Il voit, il sent bien qu'il ne pourra plus
Travailler longtemps auprès de Jésus.
Quand il a voulu lever cette planche,
Il a comme eu peur de ses mains trop blanches,
Et son vieux rabot lui paraît si lourd !
Mon Dieu, qu'a-t-il donc ? Est-ce que le jour
Est déjà fini ? Son vieux cœur s'affole,
Il a froid, il tremble. Des copeaux s'envolent
Comme autour de lui de grands papillons.
Et la nuit l'a pris dans un grand frisson.
Et la nuit s'écoule et déjà s'achève.
Le vieux patriarche est là, dans son rêve.
L'ange d'autrefois, l'ange lui a dit
Qu'il lui faut encor partir cette nuit.
Ah ! partir encor ! Vers l'exil sans doute ?
Ses pieds sont si las, si longue est la route !
Il veut se lever, puisque l'ange attend,
Marie et Jésus sont là. Doucement
Ils ont joint ses mains. Et calme, il repose.
Au bout de la nuit l'aube est déjà rose.
Jésus a levé la main pour bénir...
Joseph, pour toujours, vient de s'endormir.
(Gabriel Chrisment, En effeuillant le calendrier, poèmes, 1° série, Aubanel, Avignon, 1953, pp. 24-25.)
Date de dernière mise à jour : 20/03/2016